Sous le bitume, l’histoire méconnue de la Mauclavelière.
Aujourd’hui, domaine quelconque et sans saveur où règne l’automobile, la place de la Mairie de Parthenay est pourtant un site remarquable par son passé méconnu. Là, trônait le mystérieux logis de la Mauclavelère ! (repère 27, orange)
Cette demeure, qui appartenait au seigneur de Parthenay au XVe siècle, est connue en 1412 sous la forme : « Nos maisons de la Mauclavelere ; Vergier de nos dictes maisons de la Mauclavere ». Elle s’élevait près du cimetière de l’église Sainte-Croix (35, violet) dit « Cymentere de mere eglise de Sainte Croiz » en 1412.
Devenu seigneur de Parthenay, Arthur de Richemont y installe son hôtel de la Monnaie où il produira sa « florette » de 1426 à 1432. Le logis est alors dénommé « Maison de la Monnoye » (1426). Entre cette maison et le front sud de la Citadelle, était tracée une impasse dite « ruhette appelle la ruhe de la Monnoye » (80, orange) en 1567. Le long des fortifications sud de la Citadelle, sur un espace occupé en partie par l’actuelle mairie, existait l’auberge de la Croix Blanche (69, carmin) qui est encore citée sous la forme « Maison et estable de la Croix Blanche » en 1567. Elle quittera ce secteur avant 1688. Cette année là, le duc de Mazarin-La Meilleraye donne tout ce secteur aux religieuses de l’Union-chrétienne pour qu’elles y installent leur couvent (37, violet). C’étaient des « Filles de la congregation du seminaire de lunion chrestienne dont les employs et les exercices ont pour principal objet la conversion et le salut des ames, l’instruction et education des jeunes filles de naiscence et nouvelles converties », autrement dit des filles et femmes protestantes que l’on oblige à être catholiques. L’installation de ces religieuses ne se fit pas sans heurt avec la population car elles cherchèrent à s’emparer de la gestion de l’hôpital. De ce fait, par deux fois, l’assemblée des habitants exigea leur départ avant qu’une transaction mette fin au conflit, « en telle sorte quelles ne seront point du tout a charge au publics ».
C’est donc dans les bâtiments de la maison de la Mauclavelière qu’elles s’installent et qu’elles contraignent filles et femmes à devenir catholiques. Ainsi, les veuves de Château-Guimbert, de Messoles, de Pillot, de Brousses, de Granges, de Vaudebreuil et de Roussay sont enfermées au couvent avec l’objectif de les convertir, mais, huit ans plus tard, elles n’ont rien abjuré !
Ce sont les religieuses qui font construire l’actuelle mairie (29, orange) avec l’accord du duc de Mazarin-La Meilleraye en 1690 pour prendre des pierres au château. Cet accord sera renouvelé en 1698 par le roi Louis XIV, devenu seigneur de Parthenay. En 1700, le roi autorise également qu’elles prennent des pierres au château pour construire leur chapelle (28, orange) qui se trouvait contre la porte de la Citadelle (38, bleu) et la tour du Corps de Garde (39, bleu).
Les religieuses avaient acquis en 1697 la « Maison de l’Horloge » (17, blanc), et elles y avaient installé des « classes pour l’instruction de la jeunesse ».
Derrière l’église Sainte-Croix, s’élevait au Moyen Âge la chapelle Saint-Thomas (38, violet). Elle avait été construite en 1281 par Pierre de Viète, sur les ruines d’un édifice plus ancien qui pourrait bien être l’église primitive de Sainte-Croix fondée vers 1040. Pierre de Viète s’y fait inhumer après y avoir créé une messe quotidienne. Il avait alors proposé Laurent Barre comme chapelain, puis ce sera habituellement l’archiprêtre de Parthenay qui tiendra cette place. La chapelle est ruinée lors des guerres de Religion et les pierres auraient servi à construire le couvent des Capucins d’après un document de 1778. Un archiprêtre arrente l’emplacement en 1621. En plus du prix de vente, les nouveaux propriétaires doivent lui verser une rente de 30 sols. Les religieuses de l’Union-chrétienne rachètent le terrain en 1698 et l’annexent à leur jardin.
La Révolution apporte de profondes transformations dans ce secteur. La maison de la Mauclavelière va servir de mairie de 1792 à 1822. Le District de l’époque s’y réuni et la justice de paix y est rendue. Une partie sert également de prison durant les Guerres de Vendée. Quant au bâtiment de l’actuelle mairie (29, orange), il sert d’abord d’entrepôt. C’est là que seront entreposées les cloches descendues des clochers de Gâtine avant d’être envoyées à La Rochelle pour être transformées en monnaies, et non en canon comme l’a écrit M. Poignat. Ce même auteur a également écrit que l’actuelle mairie avait été incendiée par les Vendéens. Il n’en est rien et il existe l’inventaire des dégradations et des vols commis par les Vendéens qui démontre qu’il n’y eut aucun incendie. En outre, conformément aux états dressés après les guerres de Vendée, aucune maison ne fut brûlée à cette époque à Parthenay.
En 1800, le bâtiment de l’actuelle mairie est investi par la sous-préfecture qui y restera jusqu’en 1869.
Quant à la maison de la Mauclevelière, dont seule une partie sert de mairie, elle est occupée par l’école mutuelle de 1817 à 1838 (6, jaune), tandis qu’une partie sert d’annexe à la sous-préfecture.
La maison est rasée en 1856. Il s’y trouvait un petit souterrain (J’évoquerais prochainement les souterrains de la Gâtine) dénommé encore le « caveau des Dames » (26, orange) en 1811 car les religieuses s’y faisaient inhumées. Il fut remblayé en 1870 puis 1872 à cause du tassement des décombres. La description que l’on en conserve permet de supposer que c’est une belle réserve archéologique.
En ce qui concerne la chapelle des religieuses (28, orange), elle servira de salle de réunion et de spectacle et sera rasée en 1869.
Après le départ de la sous-préfecture, d’importants travaux sont entrepris en 1870 et un nouveau bâtiment est élevé entre l’église Sainte-Croix et la porte de la Citadelle pour servir de collège (7, jaune) (repère 6 du plan du collège avec entrée en 7). Ce collège partira en 1886 pour occuper les bâtiments de l’actuel lycée.
Utilisés de temps en temps par des réservistes, les lieux sont investis par l’école de dessin de 1890 à 1895 puis par l’école de filles de 1896 à 1946. La mairie s’y installe en 1948 et le secteur prend sa configuration actuelle en 1966 après la démolition du bâtiment construit en 1870.
L’origine de cette maison de la Mauclavelière reste un mystère. Sa dénomination pourrait signifier littéralement « mauvaise clavelière ». « Clavel » pouvant signifier, clé, clou, anneau… Il peut également y avoir une relation avec le nom d’une famille, les Claverier par exemple qui existaient au Moyen Age. Quoi qu’il en soit, ce site garde en son sein bien d’autres secrets que seules des fouilles archéologiques permettraient d’exhumer.
Albéric Verdon : https://gatine-parthenay.fr/
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